TOKYO MENTALE

東京メンタル


Process

23.03.2024 by nitromthemetronome

Pour moi, l'art avec un grand "A" n'existe pas, il n'existe que des formes d'arts, celles qui sont fossilisées dans les musées et celles qui restent à inventer. Pour cette raison, j'ai envie de partager mon processus créatif avec qui ça intéresse.

Je considère que ce que je fais est une forme d'art.

Art vient du mot latin ars qui signifie habileté, métier, et connaissances techniques.

Il n'y a pour ma part, aucune connotation esthétique sous-entendue dans la notion d'art. L'esthétique est un point de vue, une notion qui évolue avec le temps, la réflexion et les époques. Comme les nombrils tout le monde à un sens de l'esthétique.

L'art n'est pas non plus sacré et le terme "création" n'a pour moi aucune signification religieuse. Un artiste n'est pas un dieu ou béni des dieux. Il n'a ni dons ni talents, il a juste trouvé un moyen d'exprimer son monde intérieur en lui donnant une forme partageable avec ses semblables. Et en lieu et place du génie et du talent il n'y a que le travail, le perfectionnement, la formation permanente, la découverte, la curiosité et l'emprunt.

Oui l'emprunt, ou l'influence. Il n'y a rien qui vienne dans le monde de la réalité palpable ex nihilo.

Néanmoins, tout n'est pas art, même et surtout, certaines choses qui s'en réclament.

L'oeuvre d'art est une proposition, une pure expression de l'artiste, unilatérale.

On ne fait pas de l'art pour faire plaisir ou pour gagner sa vie.

C'est le public qui trouve une résonnance entre sa propre sensibililté et celle d'un artiste.

C'est pourquoi c'est le p&ublic qui doit s'informer et s'éduquer en arts pour trouver ce qui le touche et non le marché de l'art qui doit décider ce qui mérite - selon quel point de vue ? - d'arriver aux sens du public.

Quand le processus est inverse, même quand des techniques dévolues aux arts sont utilisées pour aboutir à un objet défini par un cahier des charges, ce n'est pas de l'art. C'est soit un artisanat, au mieux, soit un produit manufacturé qu'il faut vendre au plus grand nombre à l'aide des recettes habituelles du consumérisme; le marketing et la publicité. En d'autres mots, la colonisation des esprits pour imposer une idée. Cet "art" est un produit comme un autre au final. Consommable, fait pour faire éprouver des émotions bas de gamme et faciles, un objet jetable et oubliable qui ne contient rien qui puisse changer le monde.

Dés qu'il y a un cahier des charges et des impératifs économiques à l'origine du processus, il n'y a plus d'art car il n'y a plus d'artiste, il n'y a plus qu'un technicien dont les capacités créatives sont contraintes voire contrariées.

Mes oeuvres, que j'appelle pour plus de commodités podcast ou mix, s'inscrivent dans une démarche artistique. C'est une proposition sans aucune limites commerciales. Je ne cherche pas à vendre ce que je fais à un public. Si un public rencontre mes oeuvres, tant mieux, si non, c'est la routine de la création, je continuerais tant que j'aurais quelque chose à dire.

L'art n'est pas sacré, ça veut dire que ce qui mène à l'oeuvre, ce que j'appelle "l'instant oeuvre", le moment où l'artiste délivre une forme à qui veut la recevoir, le chemin traditionnellement caché au public, sera dans mon cas visible, expliqué, interrogé, remis en question jusqu'à la date de mise en ligne. Date qui n'est fixée que de manière arbitraire.

Il faut démythifier l'artiste et son travail.

C'est ce que je me propose de faire ici.

Je vais commencer par publier la playliste provisoire qui va me servir de base pour le prochaine Tokyo Mentale Podcast Zero sous-titré Guerilla Tape to the death and beyond, titre provisoire, parce qu'il en faut toujours un pour nommer les choses.

Ensuite, j'expliquerai comment j'utilise ces morceaux, comment je les agence entre eux et les remixe pour créer une narration émotionnelle.

PLAYLISTE provisoire


La musique doujin

11.03.2024 by nitromthemetronome

Le Japon est un pays étrange.

Comme partout dans le monde, les gouvernements successifs y ont mis en place des règlementations liberticides concernant la propriété intellectuelle au tournant des années 2005 / 2010, avec punitions à la clef pour ce que les ayant-droits appellent le piratage.

Les Japonais étant des gens disciplinés, ils respectent beaucoup plus la loi que les Français et votre serviteur en la matière.

Mais étrangement au japon il existe tout un pan de l'art indépendant qui est basé sur les travaux dérivés d'oeuvres originales commerciales et donc protégées par le droit d'auteur, sans que les ayant-droits y trouvent à redire.

On appelle ça le doujin.

Ces oeuvres dérivées sont vendues par leurs auteurs sur leur propre site web et lors de conventions géantes dédiées comme le Comiket à Tokyo.

Le Comiket c'est environ 600 000 personnes sur trois jours qui se déplacent pour acheter ces productions d'oeuvres dérivées. Un cauchemar pour ayant-droits.

Initialement le doujin concerne le manga. Mais avec le temps, c'est un phénomène qui s'est étendu à tous les arts; la littérature, le jeu vidéo et la musique.

En France, la loi ne permet pas de vendre des oeuvres dérivées d'oeuvres protégées par le droit d'auteur. À moins de payer pour pouvoir exploiter une licence. Au Japon c'est apparemment légale.

Même certains artistes qui ont pignon sur rue s'y adonnent à côté de leur travail "officiel".

Doujin veut littérallement dire "cercle", comme dans cercle de lecture ou d'amis, c'est-à-dire des gens qui se lient entre eux et se réunissent autour d'un même centre d'intérêt. C'est l'essence même de la culture otaku.

Un.e Otaku est une personne qui est passionnée par quelque chose, un fan hardcore dans le sens amateur éclairé.

La musique doujin est souvent liée aux jeux vidéos indépendants. Elle n'est pas un genre en soi puisqu' on y trouve tous les styles musicaux, mais c'est la partie musique électronique qui m'intéresse dans le doujin, dans les styles dubstep, neuro, psy, idm, hardcore et drum and bass.

Pour moi, tout ça s'inscrit dans un seul style musical global, la Techno.

La Techno est de la musique créée à l'aide de séquenceurs matériels ou logiciels dont l'objectif n'est pas de singer la musique faîte avec des instruments traditionnels, mais au contraire de repousser les limites des sonorités traditionnelles en créant des textures et des structures impossibles ou très difficiles à obtenir autrement. En tous cas pour les formes les plus intéressantes.

Les créateurs de la Techno de Détroit ou de la House de Chicago ont utilisé des machines à faire des lignes de basses et des rythmiques dont les sons n'étaient pas réalistes.

Ces instruments étaient initialement destinés aux musiciens traditionnels. Mais à cause de leurs sonorités très synthétiques ces boîtes à rythme et séquenceurs n'ont pas trouvé leur public cible et ont fini dans la partie "occasions" des magasins de musique.

Et c'est là que l'aventure de la Techno commence. Par la convergence d'un besoin de créer et d'un manque de moyens. Quand, dans les années 90, on n'a pas assez d'argent en banque pour s'acheter une batterie, on s'achète une boîte à rythme d'occasion pour quelque dizaines de dollars.

C'est toujours confronté aux limites que le génie humain s'exprime le mieux. C'est la raison pour laquelle la Techno ne sonne pas comme le reste de la production musicale de l'époque et que ce son a rencontré toute une génération.

Tout un pan du jeu vidéo japonais est basé sur le rythme, et pour les joueurs c'est là qu'est le défi, dans le nombre de bpms élevé, les structures rythmiques complexes et les ruptures de rythmes brutales.

La musique doujin n'est pas un genre à part entière mais il s'en dégage une esthétique globale, celle des jeux vidéos de rythmes.

Ensuite, la tendance à mélanger les influences qu'ont les Japonais à fait le reste. Le dubstep a rencontré les sonorités brutales du hardcore et les bpms du gabber posées sur les structures rythmiques complexes de la drum and bass et du breakcore, et la mélancolie de l'âme japonaise a ajouté, comme dans la Techno de Détroit, cette touche émotionnelle chaude qui fait sa particularité.

Des artistes comme Camellia, Lapix, Psyqui, Kors K, Emocosine, Feryquitous, Xing, ujico Snail's house, Moe Shop, Kamone Sano, Teddyloid, Sasakure.UK, ou encore les Coréens M2U et Yaeji ont été une révélation dans cet océan d'EDM sans âme qui ne fait que resampler en boucle tout ce que la musique électronique a fait d'intéressant jusqu'à Aphex Twin. L'EDM n'est qu'un recyclage industriel, de la musique au kilomètre devenue la bande-son mainstream des temps consuméristes.

Dans Tokyo Mentale Podcast Zero j'essaie d'attirer l'attention sur tous ces artistes qui ont créé des styles nouveaux en mélangeant les influences venues de l'Occident avec leurs cultures propres. Ce mélange mérite d'être découvert et partagé.

Après une interruption d'activité quasi complète derrière les platines pendant dix ans, j'ai retrouvé le goût du mix. Je n'utilise plus les platines mais une machine très versatile pour mes sets, un sampler Roland SP404 MKII. Une machine qui a des limites surtout en djing. Mais c'est là tout son intérêt.


TooMePoZero

07.03.2024 by nitromthemetronome

Mise en ligne sur Mixcloud de l'épisode pilote de Tokyo Mentale Podcast Zero / 東京メンタルポッドキャストゼロ que l'on peut appeler aussi toomépozéro - 東メポゼロ.

J'ai appelé le podcast "a motionless journey into doujin sound".

Ça a été un processus assez laborieux. Mélange d'apprentissage et de recherches simultanées. Comment émuler un mix platines de type turntablist avec une machine Roland SP404MKII ?

Ce mix d'un peu plus d'une heure m'a pris presque deux mois à composer.

Je suis satisfait du résultat.

Il ne me reste plus qu'à mettre en route le prochain podcast.

Je vous tiens au courant,
à plus.